mercredi, mars 07, 2007

Une histoire

Ville haute de Fianar. Ils m'ont adopté tout le long du chemin mais en gardant leurs distances. Ils ont joué devant moi, peut-être pour moi, mais pas avec moi

Elle aurait bien voulu entrer en conversation, mais il l'en empêchait.

Assise sur un banc elle lisait des histoires et moi je lisais la sienne. Elle lisait à voix haute, accrochait sur tel mot et mettait des silences dans sa lecture.
L'ensemble était harmonieux et désordonné à la fois, quelque chose comme la désordre.
Elle était là, jetant parfois des miettes aux pigeons. Les pigeons sont des animaux égoïstes, mais gourmands. Ils donnent un instant l'impression d'aimer celui ou celle qui les nourrit, ce n'est pas vrai, c'est juste une impression. Parce qu'ils sont gourmands.

Elle reprenait sa lecture, chaque jour qu'elle venait et elle venait chaque jour, à voix haute et lente. Elle était folle sans doute. Elle portait des habits très colorés mais pas voyants, beaucoup de bleus, d'oranges et d'ocres, Matisse à Venise.
Je la connaissais. Je ne lui avais jamais parlé mais au fil des passages une intimité était née, j'allais dire "entre nous", ce ne serait pas juste parce que je ne sais pas si elle a seulement remarqué mon existence. Elle était là et j'étais là, c'est tout.
Il y avait une église à quelque dizaine de mètres de son banc favori.

Un jour, il n'y eut plus personne sur le banc. La place était vide de cette femme.
Un autre jour l'église fut cachée par le glas, un enterrement où personne ne suivait le cercueil. C'était elle, j'en suis sûr alors je l'ai accompagnée. Je vous l'ai dit elle lisait des histoires et moi je lisais la sienne.

Et c'est curieux, malgré le banc vide, les pigeons continuent de venir.


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