dimanche, septembre 27, 2009

A l'entrée du palais



Un polar emprunté à la Bibliothèque.
Oublié ou déposé au milieu, un feuillet au centre duquel est écrit un prénom suivi d'un point d'interrogation. "Carina ?".
Une écriture penchée, nerveuse et masculine, intelligente. Carina ? est écrit au centre du feuillet, non pas en haut et à gauche ce qui aurait signifié que l'écrivant débutait une phrase. Non, "Carina ?" était la phrase complète et tout était dit. Un prénom de femme, écrit par une main d'homme.

Parmi des milliards de milliards de galaxies, de supernovae qui explosent, de maelströms de trous noirs, de mondes en création et d'autres qui s'écroulent, un homme écrit "Carina?" et laisse le feuillet dans un livre.
Un jour, bientôt, Carina trouvera le feuillet et pour un moment la course folle des étoiles s'interrompra.
Et ce sera un moment de paix.

mercredi, septembre 23, 2009

ImIsA





Taxi jaune, rutilant. Samby le conduit dans un bruit de ferraille auquel il ne fait plus attention, pas plus qu'au trou là où il aurait dû y avoir la poignée de la porte, fermée par un bout de fil électrique.
L'homme dit au chauffeur "roule doucement, suis la femme en bleu"
"Celle qui porte le panier ?"
"Non, mais non, celle qui a des talons, regarde…"

Elle est grande, jean et Tshirt bleus, mince avec une démarche lente et décontractée. Pas besoin qu'elle se retourne, sa beauté s'affiche de dos. D'ailleurs Samby la connaît de vue. Ses seins arrogants. Ses gestes gracieux. Même qu'une fois elle avait pris son taxi en sortant d'un hôtel. Il était peut-être sept heures du matin, elle avait une bouteille d'eau à la main comme aujourd'hui. Et des billets dans son sac, parce qu'elle est la plus belle des putes.
Elle le sait, comme elle sait qu'aucun homme ne résiste à son indifférence et à son rire. Pute ça ne la gêne pas, corps à vendre magnifique. Faire l'amour c'est naturel. Rien de plus qu'une conversation légère à un bar dont elle oublie tout, tout de suite.
D'un geste rapide et léger, elle met sa bouteille d'eau sur la tête, c'est plus confortable d'avoir les mains libres. Rien d'incongru de voir cette fille aux talons hauts et jean moulant, une bouteille sur la tête. Rien que l'admiration. Elle sourit.

L'homme dans le taxi. Rouge de trogne et de colère. Il la regarde, bouche entr'ouverte. Il devine qu'elle va dans un hôtel, un autre hôtel, voir un homme, un autre homme. Pas lui. Lui, il est lourd. Laid. Il sent la sueur. Mais il est riche. Et il la veut rien qu'à lui. Il l'a baisée. Même qu'à un moment, elle a gémi. Elle est à lui, il lui a dit "tu ne verras pas d'autre homme, je ne veux plus". Elle est à lui. Elle n'a pas répondu.

Hôtel du Nord. Elle va là, il en est sûr, on voit l'enseigne au-delà du petit marché. La foule est dense du côté ombre mais elle, elle marche au soleil, la bouteille d'eau sur la tête, légère, si légère.
Quelqu'un l'interpelle qu'elle salue d'un geste de la main, continue son chemin. Les hommes la regardent, désir, désirs. Elle, comme un oiseau. Hôtel du Nord.
Alors l'homme dans le taxi, il sort un couteau. Elle est à lui, pas à un autre. A lui. Pas à un autre. A lui. Arrêter le taxi, sortir, courir vers elle. Elle est à lui, pas à un autre. Et elle, elle ne sait rien de cet homme qui court, homme couteau rouge de trogne et de sang qui tape, tape, tap tap le sang. Elle ne sait rien.

Samby a frappé avec sa matraque, un seul coup. L'homme couteau s'effondre.
Elle, sa bouteille sur la tête, dépasse l'hôtel du Nord, continue sa route. Elle sourit. Samby sourit aussi.

mardi, septembre 22, 2009

De noblesse




A Diego Suarez (on dit "Diego"), les taxis sont jaunes et il y a du soleil.
A Diego, la nuit les lumières des bars et des boîtes sont allumées. Les terrasses se font aguichantes. Des filles passent et repassent.

Diego est un port, des bateaux de pêche espagnols s'y arrêtent. Le port est encombré de carcasses mortes, vieux navires, et des pontons déglingués. La route qui y mène est pleine de trous.
Une usine fabrique des boîtes de thon, ronron des moteurs.

La nuit des hommes dans les rues rôdent, reluquent, rient grassement, boivent trop. Des taxis guettent le client, roulant lentement, bruits de ferraille, éclairs des phares sur les trottoirs aux étals de brochettes.

A Diego la nuit, des lumières bleus et vertes à l'intérieur des casinos, quelques hommes debout à l'entrée, les uns sont videurs, les autres vidés.
En mer des barques de pêche, petites lueurs jaunes puis plus rien, la mer les a avalées peut-être en attendant de les rendre au jour revenu.

Diego, l'air y est lourd des pensées des hommes désirant.
Et les taxis sont jaunes

jeudi, septembre 17, 2009

Fruits et légumes en guise de poésie



La science de la perspective est née avec l'invention du point de fuite, point vers lequel convergent les lignes parallèles d'un dessin ce qui procure à qui le regarde l'illusion de la profondeur.
Lorsque le point de fuite se situe à l'intérieur même du dessin, l'impression de profondeur est très forte. Ce qui fut très utilisé lorsque les peintres italiens découvrirent ce procédé et le
systématisèrent. Il y a plein d'exemples l'un des plus remarquables est une fameuse peinture de Ucello (je crois), la bataille de San Romano que j'ai eu le plaisir d'admirer alors que je visitais Florence. Ou une autre bataille, les lances et les cadavres tombés à terre alignés impeccablement.

Pour ma part lorsque ce point, censé être à l'infini, est à l'intérieur du tableau j'éprouve une sensation d'étouffement, comme si l'espace se refermait sur lui-même. Comme si il n'y avait "point de fuite".

Le tableau que j'ai choisi est pas terrible comme exemple, pas de // mais le procédé y est sûrement utilisé.
Il y a beaucoup de tableaux et dessins plus représentatifs, avec des personnages dans des décors très géométriques, par exemple des carrelages au sol, tiens celui ci au détour d'internet, le pauvre Saint Sebastien peint par Mantegna.









Moi, j'aime tout particulièrement la peinture italienne de l'époque juste avant la découverte de cette perspective, 13em et 14em siècle, Giotto and predecessors and successors, les peintures dorées à l'or. Les peintres ont fait alors chanter les couleurs d'une manière extraordinaire, des couleurs simples et ce sont des tableaux qui vibrent.
Et j'adore encore plus les phrases ou les paragraphes qui commencent par "Moi..."
En allant sur Wikipdia contrôler que je ne dis pas de bêtises quant aux dates, voilà ce que je découvre "Le pape Benoît XII, via un de ses émissaires, pressa Giotto de lui donner la plus pure preuve de son talent. Ce dernier traça alors sur une feuille destinée au souverain pontife un cercle parfait à main levée."
A travers le temps et l'espace : ce que font aussi les maîtres zen, un graphisme simple, un cercle qui pour les zenistes n'est jamais clos.



A Mayotte, pas de parallèles dans les maisons ni les routes


mercredi, septembre 16, 2009

No Rain !!

Miss Bemananasy à gauche, avec sa soeur


L'idiot du village. Lorsque je pense aux idiots de villages, c'est l'image d'un imbécile heureux qui vient. Je retiens "heureux", j'oublie "imbécile", pas tout à fait quand même : et si pour être heureux il fallait être imbécile ?

Je ne sais pas si cette histoire est vraie. Mon père m'a raconté que dans notre famille Fretay, le premier fils s'appelait toujours Jacques. Mon père est fils unique mais il se prénomme Jean parce que à la génération précédente, l'aîné Jacques aurait été un imbécile heureux. Il aurait fini sa vie jardinier dans un couvent. Peut-être que pour être et rester heureux il a fait semblant d'être un imbécile…

L'imbécile heureux a le privilège de l'innocence. A "innocence" j'associe "bonté" ce qui n'est pas évident. Comme le monde n'est pas un conte de fées, il y a des imbéciles malheureux. Et des innocents pas bons.

Ce doit être terrible : l'imbécile malheureux parce qu'il est conscient d'être imbécile. De quoi devenir poivrot.

lorsque je vais sur la tombe de mes ancêtres (mes grand parents) il convient de faire des libations sur le tombeau, puis de partager avec les habitants du lieu. Les libations se font avec du Toka Gasy, ne cherchez pas dans les magasins c'est une fabrication locale non exportable. Il vaut mieux d'ailleurs : c'est fort.
La photo montre Miss Bemananasy quelques instants après avoir bu son premier verre de Toka Gasy.

vendredi, septembre 11, 2009

VadeMeCum du médecin de campagne

Jérome... Il me ressemble n'est-ce pas ? Encore que je n'aurai jamais porté une coiffure comme celle ci.
Je me demande s'il n'est pas en train de grimper tout nu. Peut-être que les grimpeurs prennent maintenant appui avec la queue, après tout les techniques évoluent tout le temps.

Lorsque je suis dans un rêve, je ne sais pas que je rêve ou alors c'est que je ne rêve plus.
Lorsque je pense, je sais que je pense et ne m'arrête pas pour autant de penser.
C'est toute la différence.

Il y a un au-dehors du rêve, ce serait le réel à condition que je n'en fasse pas partie ce qui est une hypothèse problématique mais amusante. Ou bien ce serait un surréel, une supra réalité dans laquelle nous baignerions tous comme des bébés dans le liquide amniotique, sans le savoir.

Conclusion 1 en forme d'ogive nucléaire : les vacances ne me réussissent pas.
Conclusion 2 en forme d'évidanse classique : le surréel établit des gros surchèques à l'ordre de SurJacques et j'en ai besoin : je viens d'apprendre que Johann n'a pas payé son loyer depuis le mois de Mai, et je me suis porté garant…

Conclusion 3 en forme d'oiseau lyre géant : Rachida va se marier, j'en suis heureux pour elle. Le monde n'est pas mal fait.

jeudi, septembre 10, 2009

Dialogue en forme de tongs

Maman me signale que ces photos ont été prises à Bemananasy et non Bemananas.




Lui
Je vis dans un monde imaginaire. Il n'est pas le fruit de mon imagination, non il s'impose à moi comme je m'impose à lui (parce que je n'ai pas l'impression qu'il me désire).
Mais il n'est pas vraiment VRAI, c'est une apparence.

C'est pour ça que je porte des chaussures lourdes et de grosses chaussettes, parce que le vrai monde est en dessous et je ne veux pas m'envoler. Au contraire il faut descendre. J'ai pensé à creuser le vrai monde pour m'enfouir dedans, mais l'imaginaire qui est comme une fumée dense s'insinue dans le trou et finit par le remplir.
Le VRAI monde doit rester lisse et donc impénétrable.

L'autre
Que peut-on savoir du VRAI monde ?

Lui
C'est très drôle, parce que c'est mon imagination qui me révèle ce qu'il est. L'imagination est le reflet du VRAI monde ou son souvenir, peut-être un souvenir du futur je ne sais pas.
Il suffit de rêver pour être dans la réalité réelle.

L'autre
Ce monde imaginaire, qui l'imagine ?

Lui
Personne ou plutôt tout le monde. Il est niché dans les plis de notre cerveau, nous sommes tous construits comme ça, et même autour de ça. Par conséquent personne ne se rend compte de l'illusion puisque tout le monde partage plus ou moins la même.
Les rares lucides qui nous avertissent, on les dit fous et on ne les écoute pas.
… Bien, pardonnez moi mais je dois vous abandonner parce que je m'étais promis de faire un texte de 30 lignes en police "Times" caractère 12 et c'est fait. Mais si je parle trop il y aura 31 lignes ce qui n'est pas le PROJET (les projets, lorsqu'ils sont le fruit de notre imagination, sont des reflets du VRAI monde dans le monde imaginaire). Alors, adieu, n'oubliez pas… le VRAI monde… les grosses chaussures…et pas de tongs… dangereux les tongs…



miss Bemananasy 2009

mercredi, septembre 09, 2009

RIEn




Rien...
Pas de mots, Pas d'idée, Pas d'envie.
Le soir : canapé, sudoku Force 8 et film de bagarre.
C'est tout.

lundi, septembre 07, 2009

Bemananas

Portraits d'habitants du village de Bemananas, les enfants surtout.

Madagascar,
le pays s'est encore appauvri. A Tana dans certains quartiers, des rues entières sont occupées la nuit par des familles sans logis, père, mère, enfants. Ils tendent entre deux caisses une vague bache et dorment en dessous. Ce sont des familles, pas des vagabonds, leur aspect n'est pas le même.
Le jour on ne devine rien.
.
Il y en a beaucoup, beaucoup.
Un soir, alors que je passais, une maman chantait une comptine à un enfant pour l'endormir.